C.L.A.R.A. - Qu'est-ce que la GPA ?
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  • 5. L’intérêt de l’enfant.


    • 5.1. Point de vue éthique


    • A de multiples reprises, la GPA avec compensation a été décrite comme une vente d’enfant.
      «Surrogacy compel mothers to sell their children, to use them as objects for profit-making. Markets in reproductive labour give people the opportunity to « shop » for children, seeking out arrangements that will maximize the value of their babies » 36.
      Puisque sa conception et sa naissance a donné lieu à un échange d’argent, l’enfant pourrait alors souffrir du sentiment d’avoir été acheté. A cette assertion stigmatisante, Van Niekerk objecte : « The fact that [the parents] came to have this child through a surrogacy arrangement […] in no way suggests that they will use this child as an instrument or object to do their homework [..] and that they will sell the child when it has lost its use, any more than if the parents had a child in the conventional way » 49
      D’autre part, si les normes économiques devaient s’appliquer dans les faits à la GPA, on devrait alors assister à une tarification de type commercial suivant le nombre ou le sexe de l’enfanti. Ce type de pratique serait immanquablement et avec raison condamné par les états compétents. De plus, l’intérêt des mères gestationnelles pour les bébés qu’elles portent ne soutient pas non plus cette hypothèse : lorsque les services sociaux anglais ont demandé à Kim Cotton si elle acceptait que Baby Cotton soit remise à un autre couple infertile, elle répondit «I had to say no. I had always felt that I had had the baby for those particular parents and I also tought that the father might have some rights of appeal » Si ses parents intentionnels n’avaient pas obtenu la garde de Baby Cotton, Kim et son mari l’auraient gardé avec eux 14 .
      Etre parent ne signifie pas que l’on puisse disposer à sa guise de l’enfant, mais que l’on est responsable de lui. De ce point de vue, la GPA ne constitue pas un don ou une vente d’enfant, mais la transmission des droits et devoirs parentaux de la mère gestationnelle à la mère intentionnelle (qui peut être aussi la mère génétique). Cette dernière sera aussi, de manière comparable à l’adoption, la mère sociale : « the surrogate merely agrees to a contract in which she relinquishes her rights to claim legal parenthood of the ensuing child. » 50

    • 5.2. Point de vue médical et psychologique


    • Selon une estimation de Ragone 46, on compterait 10.000 enfants nés grâce à la gestation pour autrui aux Etats Unis jusqu’en 1994. La littérature portant sur les familles issues de GPA est peu abondante, à l’instar des études sur les enfants adoptés ou issus de techniques d’AMP, car par définition, le simple fait de singulariser ces enfants pourrait induire des perturbations et est souvent jugé non éthique.
      De nombreux travaux ont montré que des liens se créent entre le foetus et sa mère durant la grossesse ; il est donc légitime de considérer l’impact de la rupture de ces liens sur le développement de l’enfant.
      De ce point de vue, si la situation est comparable à celle de l’adoption, des différences majeures existent pourtant. Contrairement à l’adoption, l’enfant a un lien génétique avec un (sinon les deux) parent intentionnel. Il est désiré par eux et ne subit à aucun moment d’abandon. Surtout, des liens mère intentionnelle-enfant peuvent se créer lors de la grossesse et le contact mère gestationnelle-enfant est en général maintenu.
      Comme dans l’adoption, le préjudice proviendrait plus probablement du secret lié à son histoire personnelle. Le droit de l’enfant implique l’accès à ses origines, notamment dans le cas de l’IA-GPA, où la mère gestationnelle est aussi la mère génétique de l’enfant. Cependant, on ne peut pas forcer des parents à révéler les conditions de naissance de leur enfant, ni lors d’une adoption, ni lors d’une GPA ; on peut en revanche les inciter à le faire.
      En général, les parents intentionnels ont l’intention d’expliquer à leurs enfants et à leur famille les conditions de leur naissance, y compris lorsque la gestatrice est aussi la mère génétique de l’enfant. On ne retrouve pas ici la tendance au secret qui existe dans le don de gamètes ; en règle générale, les parents reconnaissent le droit des enfants à connaître leur origine et est cohérent avec leur intention de poursuivre la relation avec la gestatrice et sa famille. 25 28.
      La distance existant entre la gestatrice et l’enfant qu’elle porte, qu’elle ne considère pas comme le sien 47faisait craindre pour la santé des enfants à naître. Pourtant, les enfants nés de GPA, en terme de poids de naissance, complications ou malformations à la naissance, ne présentent aucune différence avec les enfants issus de conceptions traditionnelles 50 51. Le langage est acquis à deux ans, pour les enfants FIV-GPA comme pour les autres.
      Les relations parents-enfants ont été comparées dans des familles issues de GPA et des familles témoins : les résultats, en terme d’adaptation à la parentalité, de bien-être psychologiques des parents, de qualité des soins parentaux et d’investisement émotionnel, sont globalement en faveur des « familles GPA » : « Those opposed to the practice of surrogacy have argued that surrogacy is unacceptable because it represents the commodification of children. […] In the absence of systematic information, there has been much speculation, usually negatively framed, about the outcomes of surrogacy for all those concerned. The findings of the present study do not support these negative assumptions with respect to the child first year of life » 52
      De manière générale, la société doit s’assurer que les enfants bénéficient d’un environnement épanouissant. De ce point de vue, rien ne permet d’affirmer a priori que les parents nécessitant le recours à la GPA seront de « mauvais parents » ou que la situation puisse être plus difficile à vivre, pour un enfant, que toute autre situation familiale. In fine, l’argument de l’intérêt de l’enfant, en l’absence de préjudices avérés, reviendrait à considérer que l’intérêt de l’enfant serait de ne pas naître.

    • 5.3. Point de vue juridique


    • Conséquences de l’interdiction de la GPA
      Certains pays, tels que la France, l’Espagne ou l’Allemagne ont choisi d’interdire toute forme de GPA. Les lois correspondantes stipulent en substance que « toute convention pour le compte d’autrui est nulle » (article 16-7 du code civil français). La législation française par exemple prévoit des sanctions pénales à l’égard des parents intentionnels, des participants (médecins, avocats…) ou d’intermédiaires (associations, agences…). En Allemagne, ni la gestatrice, ni les parents intentionnels n’encourent de pénalité. Ces dispositions signifient d’une part qu’aucun arrangement préalable entre la mère gestationnelle et les parents intentionnels ne pourrait prévaloir pour établir la filiation, notamment maternelle, à l’égard d’un enfant né par GPA : l’enfant né de cet arrangement serait déclaré né de la mère gestationnelle et, le cas échéant, de son mari. D’autre part, ces dispositions pénales ont pour effet de rendre très difficile la mise en relation parents intentionnels/gestatrices et d’interdire l’intervention de professionnels : médecins, psychologues, juristes….
      Dès lors, les couples souhaitant recourir à la GPA peuvent à se rendre à l’étranger, soit dans un pays européen soit le plus fréquemment, aux Etats-Unis. Des agences américaines ou russes ont traduit leur site Internet et proposent les services de traducteurs pour aider les couples non anglophones. Cependant, ces démarches sont très coûteuses et les couples livrés à eux-mêmes : les législations pénalisent les intermédiaires (associations par exemple) qui souhaiteraient informer les couples.
      Selon la législation locale, l’acte de naissance est dressé aux noms des parents intentionnels, et en général, la mère gestationnelle n’est pas mentionnée. Cependant, les actes d’état civil, bien que parfaitement en règles, sont rarement reconnus par le pays d’origine des parents, lorsque l’officier d’état civil soupçonne les conditions de la naissance (France, Cour d’appel de Rennes, 2002). Dans un cas comparable en
      Australie, il est apparu par exemple qu’aucun des parentsj 53.
      Ainsi, pour être en cohérence avec leur loi nationale, les pays interdisant la GPA refusent de reconnaître l’état civil des enfants nés à l’étranger, contre leur intérêt.
      D’autre part, l’interdiction de la GPA permet aux états d’empêcher le déroulement de la FIV-GPA sur leur sol, alors que paradoxalement, c’est la forme de GPA la plus contrôlable et la moins controversée. En revanche, une IA-GPA ne nécessite techniquement aucune intervention médicale : l’insémination peut se pratiquer à domicile avec le sperme du père intentionnel. Des sites Internet en expliquent même la procédure ; une simple petite annonce dans le journal ou sur un site Internet peut suffire à recruter une gestatrice et mettre en oeuvre le parcours. Dans ce cas, un accord d’IA-GPA peut débuter « de gré à gré » sans aucun contrôle médical, sanitaire, psychologique ni juridique.
      A la naissance, l’enfant peut être déclaré né de sa mère gestationnelle et du père intentionnelk
      Enfin, la mère gestationnelle peut à usurper l’identité de la mère intentionnelle : bien que parfaitement illégale, cette solution est difficilement détectable. De source sûre, nous savons que cette solution a été employée en France, au moins dans un nombre réduit de cas. Du point de vue de l’enfant, c’est finalement la seule solution qui lui assure une filiation maternelle sûre.
      Dans les pays tels que la Belgique, les Pays Bas, la Finlande ou le Danemark, aucune loi ne prévoit ni n’encadre la GPA. Dans le cas de FIV-GPA, certaines équipes médicales ont accepté d’aider des couples « au cas par cas » : le couple infertile et la gestatrice potentielle soumettent un dossier à l’ensemble de l’équipe médicale (gynécologues, psychologues, sage-femmes…) qui l’accepte ou non.
      Après la naissance, la mère gestationnelle cède ses droits parentaux au père intentionnel et la mère intentionnelle dépose une demande d’adoption de l’enfant de son conjoint. En Belgique, dans un cas, un juge a refusé cette adoption pour ne pas entériner un accord de GPA, alors que dans deux autres cas, elle a été prononcée dans l’intérêt de l’enfant 54.
      L’établissement d’une filiation maternelle est donc aléatoire alors qu’elle va dans le sens de l’intérêt de l’enfant.
      En conséquence, interdire la GPA pousse celle-ci vers la clandestinité, où aucun participant, et surtout pas l’enfant, ne bénéficie d’une aide médicale, psychologique et juridique adéquats : « lacking any means of obtaining adequate advice, arrangements would be made without medical or counselling support. […] Hence, legislation should make provision to ensure that couples who where determined to resort to surrogacy were able to do so in a manner least likely to result in harm to their own interest, the interest of the surrogate and most importantly, the interests of any child to be born. » (minorité du comité Warnock) Le même raisonnement a été tenu par The Ontario Law Reform Commission 55 (Chen) and The National Conference of Commissionners on Uniform State Law qui ont préféré un modèle de régulation plutôt que d’interdiction


      i En juillet 2004, un trafic d’enfant a été démantelé en France. Un bébé masculin était vendu 6000 euros alors qu’une fille était vendue 5000 euros. (J. Constant, Le Parisien, 23/07/2004)
      j Les parents gestationnels n’apparaissant sur aucun acte d’état civil, les enfants n’ont pas de parents « de rechange » si les parents intentionnels ne sont pas reconnus comme parents officiels.
      k Dans le cas du trafic d’enfant découvert en France en juillet 2004, la mère (bulgare) était soit disant en fuite en Bulgarie, l’enfant étant laissé à la garde de son père présumé (J. Constant, Le Parisien, 23/07/2004). Des dizaines de transactions auraient eu lieu.

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